Entretien avec David Tanguay, Fondateur de Wanted Technologies | Emplois.ca
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Entretien avec David Tanguay, Fondateur de Wanted Technologies

Lorsqu’il a lancé Wanted Technologies il y a 10 ans, David Tanguay ne se doutait pas des péripéties qu’il traverserait ni du chemin inédit qu’il finirait par choisir… Aujourd’hui, David Tanguay a décidé de se lancer dans de nouvelles aventures. Il laisse sa place à Scott Burton, nouveau président et chef de la direction de Wanted Technologies . Il revient pour nous sur cette expérience mouvementée et nous livre son regard éclairé sur ce marché en pleine ébullition.

Racontez-nous la genèse de Wanted Technologies 

Notre histoire a débuté comme celle de beaucoup de start-up et est heureusement retombée sur ses pieds après une évolution difficile, mais réussie.

Tout a débuté en 1997, j’avais alors 23 ans. Avec mon ami, Ian Delisle, nous avions pour idée initiale de créer un Copernic de l’emploi : un moteur de recherche d’offres d’emploi à destination des candidats. Diplômé d’informatique et de sciences politiques, j’avais dû chercher du travail à la suite d’une mise à pied et je m’étais confronté à la difficulté de dénicher des offres pertinentes parmi la myriade de sites emploi. Après un an de mise au point, notre premier produit est sorti en mai 1998, sans aucun budget.

Or Internet était à la mode chez les investisseurs. Nous avons ainsi réussi à rassembler plus de 5,5 millions $ CAD en 3 ans ! En 2001, l’équipe comptait une soixantaine de personnes, notre trafic s’élevait à 350 000 visiteurs uniques et nous comptions parmi nos annonceurs des groupes américains majeurs. Nous surfions en plein cœur de cette fameuse bulle Internet…

Wanted Technologies  un vrai conte de fées ?

Oui, mais cette belle histoire a pris fin encore plus rapidement qu’elle n’avait commencé. Nous avons reçu de plein fouet les effets de la crise de 2001 : nos revenus sont tout simplement tombés à zéro et l’équipe est passée de 60 à 10 personnes en quelques mois. Plus aucune entreprise ne se risquait à annoncer sur Internet et Google Adwords n’était pas encore là pour nous sauver… Nous étions acculés !

Quelle fut alors votre stratégie ?

Nous avons dû nous réinventer, tout était à refaire pour sauvegarder notre investissement tout en trouvant un modèle d’affaires rentable. Nous avons tâtonné pendant un an, essayant différentes formules. Notre choix s’est finalement fixé sur une formule B to B. Celle-ci nous permettait de garder notre technologie d’agrégateur d’emploi tout en la destinant aux professionnels. Nous pouvions ainsi compter sur la commercialisation de services payants plutôt que sur des revenus publicitaires aléatoires.

Certes la technologie restait similaire, mais nous avons dû affiner notre moteur : si le B to C demande de la quantité plus que la qualité, le B to B exige exactement le contraire. Nous pouvons maintenant affirmer que nous affichons 99,9% de ce qui sort sur la toile. De plus, il a fallu ajouter une fonctionnalité de mémorisation des données, car les professionnels sont friands d’historiques. Nous conservons donc en mémoire toutes les offres d’emploi affichées sur le web depuis 2002 !

Vers quel type d’entreprises vous êtes-vous tournés ?

Notre première clientèle a été les firmes de recrutement, intéressées par la possibilité de surveiller quotidiennement les offres d’emploi mises en ligne et de suivre ainsi les tendances du marché.

En 2003, nous nous sommes lancés sur une nouvelle niche qui s’est révélée porteuse : les groupes de presse. Les cahiers carrières de la presse génèrent, en effet, un chiffre d’affaires de 12 milliards $US aux États-Unis, contre 6 milliards pour Internet… Mais la fuite de leur clientèle vers Internet pousse les journaux à rechercher vers quels sites leurs anciens clients se sont tournés. Grâce à notre technologie, ils affinent leurs argumentaires de vente pour partir à leur reconquête.

À présent, notre clientèle provient à 97% des États-Unis et nous comptons aussi une quarantaine de gros clients canadiens, tels que CanWest. Ainsi, deux ans après la crise, Wanted Technologies  est reparti de plus belle !

Comptez-vous vous diversifier ?

Wanted Technologies  vient d’acheter son seul vrai concurrent : le groupe Corzen basé à New York. Cet agrégateur était davantage focalisé sur le B to C mais il nous a permis de nous lancer sur le marché des annonces classées en automobile, avec toujours la finalité de cibler les groupes de presse. Par ailleurs, nous nous sommes introduits, l’année dernière, sur le marché prometteur des annonces immobilières.

Quel regard portez-vous sur le marché de l’emploi sur Internet ?

Nous sommes vraiment en train de vivre une nouvelle phase. Les années 1999 à 2001 ont vu l’apparition et la montée en puissance des jobboards, les agrégateurs d’emploi sont ensuite venus collecter toute cette information. Aujourd’hui, nous assistons à l’arrivée des réseaux sociaux et je suis convaincu que cette nouvelle vague va changer le visage de l’emploi sur Internet. Ces sites permettent d’accéder enfin à ces candidats passifs tant recherchés !

Cela ne signifie pas pour autant la fin des jobboards mais leur croissance future sera probablement limitée. De même, la mini bulle des moteurs de recherche d’offres d’emploi touche à sa fin. Même si les temps sont beaucoup moins chaotiques qu’en 2001, je pense que la majorité des agrégateurs d’emploi B to C fonctionne encore à perte. Le B to C oblige à faire des investissements massifs en publicité et les gains tardent souvent à entrer…

Pourquoi quitter Wanted Technologies maintenant ?

Wanted Technologies  a vraiment été une expérience incroyable. En près de 10 ans, j’ai conduit l’entreprise du niveau de start-up à celui de compagnie publique, Wanted Technologies  étant entré en bourse il y a 2 ans. Mais ce nouveau statut change profondément les objectifs et requiert, à mon avis, un autre profil de président. Je pense que je suis davantage un homme de start-up, j’aime les problèmes des structures en lancement !

Des projets pour la suite ?

Je fais déjà beaucoup de coaching, je suis un peu devenu le spécialiste des situations de crises dans le milieu…

J’ai aussi, bien sûr, des projets de start-up, même s’il n’y a rien de vraiment concret pour l’instant. Je resterai dans le domaine du web et des technologies, mais pas forcément axé sur le recrutement.

Merci beaucoup !

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