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Télétravail: sachez garder vos distances

Rester à la maison (toute la semaine ou quelques jours) est de plus en plus demandé, et proposé par les entreprises qui veulent notamment séduire les jeunes candidats. Mais attention, sortir du bureau ne s’improvise pas.

Moins d’espace de travail à gérer pour l’employeur, plus de liberté pour l’employé, moins de bouchons de circulation pour tous : en théorie, le télétravail à tout pour plaire.

Pour Paul Lewis, professeur titulaire à l’Université de Montréal qui étudie le phénomène depuis son émergence dans les années 90, deux défis principaux attendent les employés qui veulent travailler de la maison : l’intégration et le maintien de l’équilibre vie professionnelle/vie privée.

Maintenant que l’on peut travailler de n’importe où ou presque avec un cellulaire et un ordinateur portable, s’identifier à son entreprise va moins de soi qu’auparavant : la « boîte » n’en n’étant plus une, justement, puisqu’elle ne se limite plus à quatre murs. Et le collègue n’est plus le voisin de cubicule. Bref, la frontière entre son emploi et le reste est devenue floue, apportant son lot de nouveaux défis pour cultiver un sentiment d’appartenance.

Loin des yeux, loin du coeur

Car même à l’heure où le télétravail se banalise, « loin des yeux » semble bien rester synonyme de « loin du cœur ». Ceux qui travaillent de la maison se sentent souvent oubliés, « notamment pour les promotions et les célébrations », précise M. Lewis.

Le problème quand il est question d’avancement, c’est qu’il faut réseauter, en interne comme en externe. Et que malgré tous les outils Internet qui existent, rien ne remplace le contact direct pour se faire connaître.

« Il faut trouver le moyen de garder riche la communication informelle », propose M. Lewis comme solution partielle à la solitude des télétravailleurs. « Notamment, il faut de la communication orale. Pas que des courriels, pas que de l’écrit! » Mais c’est une mesure temporaire dans tous les cas : si on veut évoluer, il faut revenir un jour ou l’autre dans le giron de la boîte – la vraie —, au moins à temps partiel.

Déménager son activité professionnelle à domicile sous-entend aussi que le logement de l’aspirant au télétravail soit un minimum adapté à cette nouvelle vocation. Même si le retour d’expérience montre plutôt un gain de productivité chez les télétravailleurs, il faut limiter les distractions domestiques. « Je me souviens qu’il y a 20 ans, Bell exigeait de ses pionniers en la matière une pièce fermée réservée à leur fonction. La compagnie allait même jusqu’à fournir le mobilier, l’ordinateur et la connexion Internet », se souvient M Lewis.

En outre, ce ne sont pas tous les employés qui ont l’étoffe d’un télétravailleur, continue-t-il. Oeuvrer en autonomie sous-entend une forte autodiscipline pour être capable d’être productif. De leur côté, les gestionnaires doivent apprendre à plus juger les employés sur la qualité du travail rendu que sur la ponctualité ou l’assiduité.

Mais surtout, maintenant que le travail fait partie des meubles, il faut absolument être capable de faire en sorte qu’il ne dévore pas la vie privée. « C’est le principal écueil, souligne M. Lewis. Beaucoup de gens ont arrêté le télétravail parce qu’ils avaient l’impression d’être exploités, juste parce qu’ils travaillaient tout le temps! »

Du coup, le télétravail est un bon outil d’appoint pour apporter de la flexibilité à l’employé comme à l’employeur, mais pas forcément une solution à long terme, conclut M. Lewis.

Finalement, il semble bien que la vérité soit quelque part entre la maison et le bureau…

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